Numéro 3/2026 des Langues Modernes
Coordination : Claire Garnier-Tardieu (Université Sorbonne-Nouvelle – Paris 3) et Margot Kuligowska Esnault (Inspé de Nantes)
Calendrier :
Publication de l’appel : octobre 2025
Soumission des propositions d’articles (3000 signes espaces et bibliographie comprises, accompagnés de 3 mots clés) aux coordonnatrices et à la rédactrice en chef : 19 octobre 2025
Réponse aux auteurs et autrices : 9 novembre 2025
Envoi des articles aux coordinatrices et à la rédactrice en chef : 31 janvier 2026
Réponse suite au comité de lecture des Langues Modernes : mars 2026
Retour des articles finalisés après intégration des corrections demandées : 31 mai 2026
Publication du numéro : Septembre 2026
Contacts :
Claire Garnier-Tardieu et Margot Kuligowska Esnault (coordinatrices du numéro) : claire.tardieu@sorbonne-nouvelle.fr ; margot.esnault@univ-nantes.fr Marie-Claire Lemarchand-Chauvin (rédactrice en chef des Langues Modernes), redaction.languesmodernes@gmail.com
Consignes aux auteurs
www.aplv-languesmodernes.org/spip.php ?article1402
Langues des articles : français ou autre langue (prévoir une traduction française qui sera accessible via QRcode)
Ce numéro se propose d’explorer un domaine relativement peu étudié de manière intrinsèque et approfondie en didactique des langues, à savoir la poésie. L’intégration de la poésie dans l’enseignement des langues ne va pas de soi. Malgré les valeurs qu’on lui reconnaît, la poésie peut apparaître comme un objet problématique (Siméon, 2003) et intimidant (Joubert, 1999), aussi bien en langue première (L1) qu’en langues étrangères ou secondes (L2). Pour Siméon (2003), on pourrait renoncer à l’expérience poétique à l’école, en soutenant que la poésie ne devrait pas « se compromettre » dans le processus pédagogique, ou encore faire du « problème » posé par la poésie, l’argument même de son enseignement. Pourtant, la poésie a toujours conservé sa place dans les situations de sensibilisation ou d’apprentissage des langues, de l’école maternelle à l’enseignement supérieur. Mais qu’entend-on par poésie ? Il est d’usage de faire référence à l’étymologie grecque poiêsis (« création »), terme lui-même issu du verbe poieîn qui signifie « faire, créer ». Toutefois la poésie, en tant que « forme d’art spécifique dont le langage est le matériau » (Joubert, 1999), semble être un phénomène universel, non spécifique à une aire culturelle particulière. Cette universalité s’accompagne d’une extrême diversité de formes et de fonctions. Les objets verbaux, écrits ou oraux, que nous avons l’habitude de désigner comme « poèmes » et de considérer comme la quintessence du fait littéraire (Lilti, 2005), se révèlent très disparates. La conception de la poésie varie non seulement selon les lieux, mais aussi selon les époques. Elle n’est pas figée dans le temps ; elle subit des transformations, tout comme les sociétés et les mentalités humaines (Joubert, 1999). De même, son intégration dans l’enseignement des langues peut se réinventer et évoluer.
Pourquoi faire de la place à la poésie en cours de langue ? Tout d’abord, son potentiel sur le plan du développement langagier est très riche, les poèmes présentant de nombreux atouts pour la construction des compétences grammaticales, lexicales et phonologiques. Ensuite, bien au- delà du corpus « classique » (des textes dits patrimoniaux), chaque texte d’auteur reflète la diversité d’une aire culturelle donnée, à laquelle les enseignants de langue peuvent vouloir sensibiliser. Enfin, la poésie contribue à la réalisation des objectifs fondamentaux de l’éducation, en véhiculant des valeurs (éthiques, esthétiques) et des fonctions (par exemple, identitaire) propres à toute la littérature. Selon Widdowson (1992), contrairement à la langue « ordinaire » qui maintient l’illusion de stabilité et d’ordre social, le langage poétique permet de représenter la diversité de l’expérience individuelle qui ne peut pas être décrite par la langue de référence. Cette « poétentialité » sert à la fois le « je » individuel et social. En ce sens, la poésie, comme tout art, défie l’ordre établi et les idéologies. Le sentiment de liberté de quiconque utilise la langue de manière créative rejoint le rôle émancipateur de l’école et la formation de l’esprit critique et esthétique des futurs citoyens.
Dans ce numéro, nous proposons d’approfondir la réflexion autour de la problématique suivante : Aborder le fait poétique dans les situations d’enseignement des langues – Quoi ? Pour qui ? Pour quoi faire ? Comment ?
Quoi ? Cette question traite du choix de répertoire : Quel corpus poétique ? Sous quelle forme (vers traditionnels, vers libres, poèmes en prose, etc.) ? Quel lien entre poésie et chanson, slam, rap, etc. ? Quels auteurs, quelles époques, quels environnements culturels ?
Pour qui ? Les propositions pourront concerner les élèves de tous les niveaux du système éducatif et toutes les langues enseignées étrangères ou secondes.
Pour quoi faire ? On pourra se demander quels sont les objectifs visés. S’agit-il de faire découvrir un genre littéraire avec ses caractéristiques (rythmes, rimes, jeux de mots, etc.), ou un poète et son univers esthétique, de faire acquérir des techniques d’analyse, d’offrir une expérience d’écriture poétique sous les formes les plus diverses, ou encore de favoriser l’expression des émotions, des pensées plus personnelles ?
Comment ? Les propositions pourront s’appuyer sur une grande variété d’approches impliquant différents types d’activités, de tâches ou de projets. Voici quelques exemples possibles à titre indicatif :
● Pistes d’exploitation pour lire, dire ou écrire un poème.
● Poésie en tant qu’outil pour développer la compétence linguistique (grammaire, lexique, phonologie)
● Poésie et peinture
● Corps et poésie dans l’approche de la cognition incarnée
● Écriture plurilingue et projets interdisciplinaires
● Poésie et traduction
● Poésie, IA et autres outils numériques.
La réflexion pourra aussi être menée avec un regard didactique distancié permettant d’aborder d’autres problématiques liées à l’enseignement-apprentissage de la poésie dans un contexte précis ou général telles que :
● Analyse de productions d’élèves ou d’étudiants
● Analyse du matériel pédagogique relatif à la poésie
● Analyse de la place de la poésie dans les manuels ou dans la progression pédagogique annuelle
● Analyse de la place de la poésie dans les programmes de langues vivantes
● Représentations des enseignants et des apprenants, leur rapport à la poésie
● Leviers et freins dans l’exploitation de la poésie
Ce numéro accueillera deux types de contributions :
– des articles de recherche : (max. : 25000 caractères espaces, bibliographie et annexes comprises) recherche conceptuelle ou recherche-intervention ; recherches menées dans une posture explicative ou compréhensive, avec des données de nature quantitative ou qualitative.
– des récits et analyses d’expériences pédagogiques (max. : 15000 caractères espaces, bibliographie et annexes comprises).
Bibliographie
Aden, J. (2013). De la langue en mouvement à la parole vivante : théâtre et didactique des langues. Langages, 4(4), 101-110. https://doi.org/10.3917/lang.192.0101
Joubert, J.-L. (1999). La poésie. Paris : Armand Colin.
Kuligowska Esnault, M. (2017). Du lecteur au scripteur : expérimentation de l’écriture poétique en langue étrangère, Les Langues Modernes, 4, 59-66.
Kuligowska Esnault, M. (2019). Poésie et enseignement-apprentissage des langues (Thèse de doctorat). Université de Nantes. http://www.theses.fr/2019NANT2026
Lapaire, J.-R. (In press). Engaging the ’learning body’ in language education. English and American Studies, In press. <hal-02091836>
Lapaire, J.-R. (2014). À corps perdu ou le mystère de la désincarnation des langues. E-CRINI – La revue électronique du Centre de Recherche sur les Identités Nationales et l’Interculturalité, 6. <halshs-01628916>
Lazar, G. (1993). Literature and Language Teaching. A Guide for Teachers and Trainers. Cambridge : Cambridge University Press.
Lilti, A.-M. (2005). Écriture poétique, langue maternelle et langue étrangère : Contribution à une histoire polyglossique de la poésie française. Paris : L’Harmattan.
Médioni, M.-A. (2017). Restituer sens et saveur au texte littéraire. Les Langues Modernes, 4, 42-50.
Potapushkina-Delfosse, M. (2020). La marche et le tracé pour entendre et prononcer une langue étrangère. In L. Abou Haidar (coord.) L’enseignement de la prononciation en classe de langue : démarches et outils. Les Langues modernes, 3(1), 57-67.
Siméon, J.-P. (2003). Le problème avec la poésie. Les Cahiers Pédagogiques, 417, 9-11.
Varela, F. (1993). L’inscription corporelle de l’Esprit. Sciences cognitives et expérience humaine. Paris : Seuil, coll. La couleur des idées. Widdowson, H.G. (1992). Practical Stylistics: An approach to poetry. Oxford :