L’idée d’un paradoxe de notre époque conduit à s’interroger sur la bascule entre le naturel et l’artificiel en linguistique appliquée. Un lien peut être perçu comme une opposition, une interdépendance, une complémentarité ou encore une transformation qui peut nécessiter une analyse scientifique critique. L’émergence des grands modèles de langages (LLM) comme ChatGPT (Casal & Kessler, 2023) formulant des réponses crédibles a plongé le monde dans un émerveillement d’un côté et dans une panique de l’autre, fragilisant la place de la création humaine. Pourtant, pour Poibeau (2023, en ligne) « [s]’agissant de la créativité, je ne pense pas que l’on puisse attribuer une telle qualité à une machine. Pour avoir de la créativité, il faut avoir un but, une intention, ce que n’ont pas les systèmes d’intelligence artificielle. Ce ne sont « que » des modèles mathématiques, l’intention reste donnée par l’humain qui fixe le thème. Faut-il chercher à aller au-delà ? C’est une question éthique qui reste en débat ».
NéALA2025 cherche à participer à ce débat en questionnant le continuum entre naturel et artificiel en linguistique appliquée (Finardi, 2023) en prenant trois axes transversaux.
Axe 1 : Les défis du naturel en linguistique appliquée
Considérer l’Humain comme un être sensible dans un monde complexe (Morin, 2014) participe aux différents prismes par lesquels le langage humain est étudié en linguistique appliquée. Cette considération ne se limite pas aux défis posés par une approche critique du numérique (Soubrié, 2020) mais s’étend également à comment chaque individu, éventuellement au sein d’un groupe, modélise le naturel qui l’entoure. Les propositions de communication pourraient s’inscrire dans un ou plusieurs thèmes suivants :
Axe 2 : La place de l’IA dans les activités humaines
De plus en plus de chercheur·e·s et d’enseignant·e·s ont recours aux systèmes de l’IA pour réaliser des tâches qui autrefois nécessitaient l’intervention de l’Humain pour traiter les données : de la reconnaissance faciale et vocale, des agents conversationnels, des outils de TAL et des traducteurs automatiques, etc. Ces outils sont-ils réellement « intelligents » ou bien dépourvus de créativité (Poibeau, 2023) ? Représentent-ils une menace pour l’Humain et ses activités contemporaines ? Ou encore sont-ils complémentaires, ouvrant de nouvelles perspectives, notamment en linguistique appliquée ? Les propositions de communication pourraient s’inscrire dans un ou plusieurs thèmes suivants :
Axe 3 : Les impensés dans le numérique et au-delà
L’avènement de l’IA et autres outils (numériques) expose les professionnels et professionnelles de la linguistique appliquée à un panorama d’applications qui ne sont pas sans conséquences sur leurs pratiques et activités. Si le comment de l’utilisation de l’IA pourrait s’ancrer dans un usage éclairé pour ne pas tomber dans les impensés numériques (Falgas & Robert, 2023), une réflexion sur l’éthique d’une telle pratique et ses retombées sur l’intelligence collective (Devillers, 2023) anticiperait un certain nombre d’enjeux à prendre en compte dans la relation Humain-machine. Le même type de considérations semble tout aussi nécessaire quand il s’agit de penser une action sociale qui exclurait le numérique pour des raisons de responsabilité sociétale et de développement durable, par exemple. Les propositions de communication pourraient s’inscrire dans un ou plusieurs thèmes suivants :
Ces questions ne sont pas exhaustives et les propositions pourront s’emparer librement de chaque axe. Les contributions attendues peuvent être théoriques ou empiriques, disciplinaires ou méthodologiques, relever des expériences de terrain ou des projets de recherche. Tous les domaines de la linguistique appliquée sont les bienvenus. Les propositions peuvent être individuelles ou collectives sous forme de symposium.
Bibliographie restreinte
Casal, J. E., & Kessler, M. (2023). Can linguists distinguish between ChatGPT/AI and human writing ? A study of research ethics and academic publishing. Research Methods in Applied Linguistics, 2(3), 100068. [Lien]
Devillers, L. (2023). Il est urgent de former à l’éthique de l’IA . À Priori(s). [Lien]
Falgas, J., & Robert, P. (2023). Présenter l’IA comme une évidence, c’est empêcher de réfléchir au numérique. The conversation. [Lien]
Finardi, K. (2023). The paradox of our time and role of applied linguists in it. Conférence donnée à l’occasion du webinaire 2023 de l’AFLA. [Lien]
Morin, E. (2014). Enseigner à vivre : manifeste pour changer l’éducation. Arles : Actes sud/Play bac.
Poibeau, T. (2023). La créativité peut-elle être artificielle ? Le journal CNRS. [Lien]
Soubrié, T. (2020). Penser le numérique : orientations pédagogiques et préoccupations de recherche en didactique des langues. ALSIC – Apprentissage des Langues et Systèmes d’Information et de Communication, Vol. 23. [Lien]